Dans un article paru il y a déjà 5 ans dans le journal Le Monde, sous le titre « Vivre la sobriété heureuse* le philosophe et essayiste Patrick Viveret nous rappelait que l’absence de sagesse et de vraie spiritualité nous faisait perdre la réflexion éthique et oublier le sens des priorités. Avec pour conséquence de nous entraîner dans une démesure ayant pour objectif de nous distraire de nos malaises existentiels et sociétaux. Il vaut la peine d’être interpellés par un extrait de son article ci-dessous qui met en évidence les moyens mis à disposition de cette course à la démesure alors que l’on délaisse la résolution des besoins fondamentaux qui seule permettrait un développement de l’être et d’un mieux vivre ensemble solidaire. Ce changement de regard, tant au niveau de la personne que de l’action socio-politique ne serait-il pas la meilleure prévention aux replis identitaires et à la montée des fanatismes qui prennent appui sur les injustices et les déséquilibres provoqués par le refus actuel des limites et de notre condition humaine?
« En 1998, le programme des Nations unies pour le développement (PNUD) comparait en effet les budgets supplémentaires nécessaires pour couvrir les besoins vitaux de la planète (faim, non-accès à l’eau potable, soins de base, logement, etc.) et mettait en évidence que les seules dépenses de stupéfiants représentaient dix fois les sommes requises pour ces besoins vitaux (à l’époque 400 milliards de dollars par rapport aux 40 milliards recherchés par les Nations unies). On note le même écart s’agissant des dépenses annuelles de publicité.
La société dure est en permanence compensée par la production du rêve d’une société harmonieuse, et l’endroit par excellence où s’opère ce rapport est la publicité qui ne cesse de nous vendre de la beauté, du bonheur, de l’amour, voire de l’authenticité, messages dans l’ordre de l’être, pour mieux nous faire consommer dans l’ordre de l’avoir. Quant aux budgets militaires qui expriment les logiques de peur, de domination et caractérisent par conséquent les coûts (et les coups) de la maltraitance interhumaine, ils représentaient eux vingt fois ces sommes ! Ces dépenses passives de mal-être représentent (car le même écart est maintenu dix ans après) environ quarante fois les dépenses actives de mieux-être nécessaires pour sortir l’humanité de la misère et assurer un développement humain soutenable tout à la fois écologique et social.
Il nous faut donc répondre au couple formé par la démesure et le mal-être par un autre couple, celui de la « sobriété heureuse », formé par l’acceptation des limites et par l’enjeu positif du « bien-vivre », … la construction de politiques et d’économies du mieux-être. »
Pour lire l’article complet de Patrick Viveret, Le Monde 9 juin 2009, cliquez ici